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jeudi 29 mai 2014

Episode 10 : Strange fruit



L’émancipation de 1865, censée libérer tous les esclaves des Etats du Sud, n’est pas du goût de tout le monde. Elle accorde le droit de vote et l’égalité formelle aux Noirs, et va être vécue par les suprémacistes blancs comme une profonde défaite, une atteinte humiliante au « mode de vie » ancestral sudiste.

Dès la fin du XIXème vont se mettre en place dans ces Etats des séries de lois, écrites ou non, qui vont régenter les rapports entre Noirs et Blancs, pour perpétuer la séparation totale entre eux, et maintenir la domination absolue du pouvoir blanc sur les anciens esclaves. Ces lois de ségrégation vont prendre le nom de « lois Jim Crow », en référence à un personnage célèbre de « minstrels shows », ces spectacles itinérants dans lesquels les comédiens blancs se noircissaient le visage au charbon, et singeaient les Noirs du sud : Jim Crow est paresseux, libidineux, animal, voleur, sournois… Les lois qui prennent son nom vont sévir jusqu’à la fin des années 60. Dans tous les espaces publics, les Noirs ne doivent pas se mélanger aux Blancs. Train, bus, bars, restaurants, toilettes, trottoirs. Les Noirs doivent adopter le comportement servile qui leur est réservé. En sortir peut leur coûter la vie. Le KKK, milice suprémaciste, prend son essor et réunit de nombreux notables, y compris des hommes de Loi. La pratique du lynchage s’instaure assez massivement : on torture et on exécute sans procès, avec parfois une participation active d’une grande partie de la population blanche, le but étant de maintenir par la terreur toutes les anciennes règles esclavagistes.

Dans les années 1930, Billie Holiday, chanteuse de cabaret du Nord, a chanté cette sinistre tradition qui a tué des milliers d’hommes et de femmes, dans le sublime morceau « Strange Fruit » qui lui colla à la peau jusqu’à la fin de ses jours. A l’origine, un beau poème écrit par un prof juif communiste new-yorkais, Abel Meeropol, pour un journal syndical. Mais Billie, qui ne s’était jamais mêlée de politique auparavant, y mit une telle intensité dramatique, semblant charrier dans sa voix des siècles de souffrance, que ce morceau devint le sien, et le symbole de la lutte pour une réelle émancipation. Une des premières « Protest songs » africaines-américaines, un monument de l’histoire des vaincus, un hymne du Mouvement..

L'émission : BCK MIR 10
La playlist : BCK MIR 10 PLAYLIST



Le sample de la semaine est tiré de la BO de Foxy Brown, l'original, avec la terrible Pam Grier :



Masta Ace, c'était le Juice crew, grande époque, golden age à New York. Souvenirs :







Il a quasiment fait que des albums de fou...

Maintenant c'est un peu des vétérans les lascars, mais ça rappe encore...



Punchline et Wordsworth, c'était ça quand même...










Plus de vidéos en cliquant sur le lien :

jeudi 22 mai 2014

Episode 9 : Stagger Lee



1895, le soir de Noël, à Saint Louis, Missouri. Deux types jouent aux cartes, ou aux dés, dans un bar mal famé du quartier rouge : Stagger Lee, macro, ou dealer. Billy Lion, un cave, ou un flic, ou une poucave. Billy perd, ou triche. Stack se fâche. Son chapeau, un Stetson à 5 dollars, tombe à terre dans l’embrouille. Affront suprême. Stagger Lee sort son flingue et, malgré les supplications du mauvais joueur, abat froidement Billy de quelques balles dans le buffet. Quelques lignes dans la presse du coin. Un Noir tue un autre Noir. Histoire banale, qui aurait dû s’arrêter là. Mais c’était compter sans la magie de la transmission orale.

Très vite apparaissent des chansons qui vont faire de ce fait divers une des légendes urbaines les plus fécondes de la culture africaine-américaine. On chante Stagger Lee dans les champs, dans les plantations, dans les fermes pénitentiaires. Les bluesmen se saisissent de son histoire et la trimballe le long des routes d’errance. De version en version, la figure de « Stack o Lee » se transforme. D’abord symbole du mauvais joueur qui ne supporte pas la défaite et tue son frère pour une sombre histoire de chapeau, il va devenir le « Bad Man » par excellence, le mec dur, froid, impitoyable, à qui on doit le respect. Le mec du ghetto, qui répond à des lois qui ne sont pas celle du blanc, ces fameuses lois de ségrégation qui sévissent dans le Sud pour perpétuer l’esclavage. Stagger Lee devient l’anti « Jim Crow ». Quant à Billy Lion, ou « Billy The Liar », il va incarner celui qui ne respecte pas la loi du ghetto, qui n’honore pas la parole donnée. Celui qui triche, celui qui s’écrase, la « victime » méprisable.

La figure de Stagger Lee va traverser les époques. On la retrouvera dans la Soul, cette musique de l’âme qui accompagne la lutte pour la dignité et l’égalité dans les années 60. On la retrouve chez les héros des films Blaxploitation qui glorifient les macros et les dealers. Dans la littérature Noire. Chez les Black Panthers. Dans le gangsta Rap des années 90. Dans le Rocksteady. Et partout, il est le hors-la-loi par excellence. Celui qui obéit à ses propres règles, qui piétine la « bonne morale » pour se faire sa place dans un monde régi par la loi blanche issue de l’esclavage.

 
L'émission : BCK MIR 9
La playlist : BCK MIR 9 Playlist







Une curiosité, tirée du film Black Snake Moan. Même Samuel Jackson est un stackolee ! On y voit aussi comment le blues est une musique de danse. Slow drag...



Comme d'hab, plus d'infos et de videos en clikkkant sur le lien :

PLAYLISTS


Des auditeurs se sont plaints de nos playlists, les titres des morceaux n'apparaissent pas sur certains lecteurs. On a mis nos équipes sur le coup, et y aura d'ici peu toutes les playlists taggées correctement, ainsi que la 7, qui manque cruellement. Un peu de patience. N'hésitez pas à protester, rubrique "contact".

mardi 20 mai 2014

Stagger lee




Cette semaine, émission spéciale sur Stagger Lee, figure mythique du bad man, du bad nigger, qui piétine la morale pour se faire une place dans un monde dirigé par les blancs. Fait divers sordide de la fin du XIXe, ce banal meurtre pour un stetson est devenu célèbre par la force de la transmission orale. D'innombrables blues ont repris et transformé l'histoire, qui a ensuite infusé dans l'imaginaire de la Blaxploitation, du gansta rap, des rude boys.

vendredi 16 mai 2014

Episode 8 : Apollo Brown

 

Apollo Brown, producteur de Detroit nourri à la Soul et au Hip-hop des nineties, vient de sortir un projet instrumental assez réussi. On en profite pour faire un petit tour dans ses productions et la musique qui l'a forgé. Un grand merci à mon poto Pucci pour la sélection.

L'émission : BCK MIR 8
La Playlist : BCK MIR 8 Playlist





 
 
 

L'album de Lee Moses, c'est par là : Time and place
Pas mal de vidéos en cliquant sur le lien :

jeudi 1 mai 2014

Episode 7 : Breakbeat's Revenge



Cette semaine,on se fait plèze. Petite pause dans la préhistoire, retour au Hip-hop, et à sa colonne vertébrale : le Breakbeat. Pour ceux et celles qui commençaient à en avoir marre des oldies, on va s'écouter des gros classiques des 70's et se promener dans les morceaux qui les ont pillés. Booker T, Al Green, Melvin Bliss, Syl Johnson, et Ultramagnetic MC's, KRS one, Mobb Deep, Gangstarr, Public Enemy...

L'émission : BCK MIR 7
La playlist : BCK MIR 7 PLAYLIST