Cette semaine, un nouvel épisode sur la révolte, après en avoir consacrés beaucoup à la souffrance et l'aliénation.
C’était il y a pile un demi-siècle.
C’était hier. Le quartier de Watts à Los Angeles s’embrasait, ouvrant la
voie de ce qu’on allait appeler les hot summers : tous les étés,
jusqu’à la fin des années 1960, les quartiers Noirs se soulevèrent, la
plupart du temps en réaction à des violences racistes ou policières.
1965 marqua un tournant pour le
« Mouvement des droits civiques », qui visait à obtenir l’égalité des
droits, la fin de la ségrégation, la dignité. En Mars, la marche de
Selma à Montgomery, dirigée par le révérend Martin Luther King, chantre
de la non-violence, était réprimée dans le sang. Un mois plus tôt,
Malcolm X était assassiné par des fidèles de la Nation Of Islam –
vraisemblablement pilotés par le F.BI
– qu’il avait quitté l’année précédente, en conflit ouvert avec les
positions racistes et la vie dissolue de son dirigeant. Depuis la
campagne de boycott des bus lancée dix ans auparavant à Montgomery, tous
les moyens non-violents semblaient avoir été employés : sitt-in,
marches, boycotts, inscription sur les listes électorales… et se
heurtaient toujours au même mur du racisme structurel américain. Le
modèle intégrationniste prôné par Luther King et ses apôtres commençait à
être sévèrement critiqué par la rue, qui ne tarda pas à le
manifester, d’une manière moins polie que ses pseudo-dirigeants.
Surtout, l’égalité formelle réclamée dans le Sud semblait dérisoire pour
le peuple des ghettos du Nord, le grand oublié des revendications, qui
subissait pourtant une ségrégation plus sournoise mais tout aussi
écrasante, géographique, économique, sociale. Entassés dans des
quartiers pourris rongés par la pauvreté, le chômage, la drogue, les
violences policières, on savait bien que tendre la main avec amour ne
suffirait pas.
A Watts, c’est un contrôle routier qui
tourne mal qui mit le feu aux poudres. Du 11 au 17 août, environ 1000
bâtiments furent détruits, une trentaine de personnes tuées, en partie
par la police, 4000 arrêtées. 35 millions de dollars de dégâts. Puis
vint Detroit en 1967. Puis des centaines de ville en 1968, après le
meurtre de Luther King. L’atmosphère avait changé. Il n’était plus
question de baisser la tête, d’encaisser les coups en silence.
Carmichael, issu du mouvement des étudiants non violents, lança le Black
Power. Sur les cendres de Malcolm et Watts se dressèrent les Black
Panthers. La musique elle-même, malgré un marché du disque plus que
frileux, finit par s’en mêler.
Quand le peuple force ses leaders
auto-proclamés à se radicaliser. Quand les artistes sont sommés de
prendre position. Quand la peur change de camp, enfin.
L'émission :
BCK MIR 12
La playlist :
BCK MIR 12 PLAYLIST
Comment elle les regarde les bien-propres-sur-eux... Elle finira plus tard par regretter ses engagements, estimant que ça lui a fait rater sa carrière. Nina Simone, comme beaucoup, a mal vieilli, des histoires circulent sur son antisémitisme maladif à la fin de sa life, la fréquentation de Farrakhan et l'abus de tise et d'égocentrisme n'y sont sans doute pas pour rien ; mais à cette époque elle irradie. La chanson a été interdite dans plusieurs Etats du Sud, notamment à cause du blasphème.
Les paroles :
Alabama's gotten me so upset
Tennessee made me lose my rest
And everybody knows about Mississippi Goddam
Alabama's gotten me so upset
Tennessee made me lose my rest
And everybody knows about Mississippi Goddam
Can't you see it
Can't you feel it
It's all in the air
I can't stand the pressure much longer
Somebody say a prayer
Alabama's gotten me so upset
Tennessee made me lose my rest
And everybody knows about Mississippi Goddam
This is a show tune
But the show hasn't been written for it, yet
Hound dogs on my trail
School children sitting in jail
Black cat cross my path
I think every day's gonna be my last
Lord have mercy on this land of mine
We all gonna get it in due time
I don't belong here
I don't belong there
I've even stopped believing in prayer
Don't tell me
I tell you
Me and my people just about due
I've been there so I know
They keep on saying 'Go slow!'
But that's just the trouble
'Do it slow'
Washing the windows
'Do it slow'
Picking the cotton
'Do it slow'
You're just plain rotten
'Do it slow'
You're too damn lazy
'Do it slow'
The thinking's crazy
'Do it slow'
Where am I going
What am I doing
I don't know
I don't know
Just try to do your very best
Stand up be counted with all the rest
For everybody knows about Mississippi Goddam
I made you thought I was kiddin'
Picket lines
School boy cots
They try to say it's a communist plot
All I want is equality
For my sister my brother my people and me
Yes you lied to me all these years
You told me to wash and clean my ears
And talk real fine just like a lady
And you'd stop calling me Sister Sadie
Oh but this whole country is full of lies
You're all gonna die and die like flies
I don't trust you any more
You keep on saying 'Go slow!'
'Go slow!'
But that's just the trouble
'Do it slow'
Desegregation
'Do it slow'
Mass participation
'Do it slow'
Reunification
'Do it slow'
Do things gradually
'Do it slow'
But bring more tragedy
'Do it slow'
Why don't you see it
Why don't you feel it
I don't know
I don't know
You don't have to live next to me
Just give me my equality
Everybody knows about Mississippi
Everybody knows about Alabama
Everybody knows about Mississippi Goddam
Le discours complet :
Message to grassroots
L'esthétique de la Motown, mais un hymne des émeutes... Un journaliste qui demande deux ans plus tard aux Jackson 5 ce qu'ils pensent de la situation politique se fait couper par un responsable de cette usine à tubes qui vient de les signer : " Les Jackson 5 sont un produit commercial, ils ne pensent rien "
L'impayable arrivée d'Isaac Hayes le mégalo, et le
révérend Jackson qui peut pas prononcer le "Bad motherfucker", ni le
"Black Moses" :
Richard Pryor, encore inconnu, j'espère que vous comprenez un peu l'anglais, pas trouvé de version sous-titrée. "That nigger is crazy !"
Le film complet :
WATTSTAX
Les Last Poets, merci à Monsieur Blod pour ce lien précieux :
La semaine prochaine, on parlera pas mal des émeutes de L.A en 1992, pour continuer la micro histoire musicale des révoltes. Navré pour les imprécisions et les caricatures, le temps est trop compté, le sujet trop vaste, les talents d'orateur trop maigres. On espère juste que ça vous donnera envie de creuser. Dig it !